Les pierres en grès rose des Vosges proviennent généralement de zones proches de la surface du sol. Ainsi, au moment du labour au cheval, nous procédons à l’épierrement : c’est une opération qui consiste à débarrasser le sol du vignoble des pierres qu’il contient. Ceci rend le travail de nos chevaux plus laborieux, car à chaque pierre découverte le cheval s’arrêtera et la pierre sera mise de côté.
Bien entendu, la découverte de ces pierres contenues dans le sol ne suffit pas à répondre à nos besoins. C’est pourquoi, lors de la construction de murs particulièrement importants, nous avons eu la chance de récupérer des pierres de l’ancienne gare de Mulhouse ou de la prison d’Ensisheim.
L’ÉDIFICATION DU MUR
Edifier un mur poids en pierre sèche (qui supportera la pression de la terre) à flanc de montagne impose la règle du 1/3 de largeur aux fondations rapporté à la hauteur finale. Il s’agit dans un premier temps de bien régler le « fruit » (l’inclinaison qu’il faudra pour contrebalancer la poussée latérale du terrain).
CHOIX ET PRÉPARATION DE LA PIERRE
Le maçon choisit à l’œil un bloc dans le tas de pierres, et évalue celui qui conviendra le mieux à son ouvrage. Puis, selon les règles de « l’opus incertum » (travail aléatoire), il lui faudra buriner, fendre, ajuster cette pierre.
Il doit en premier lieu faire « sonner » la pierre à l’aide de la mailloche. Cette opération lui permet d’entendre le sens du fil cristallin de la pierre afin de déterminer par quel biais l’entreprendre. D’un simple coup de masse, la pierre se fend droit dans le fil et se fractionne pour donner des ébauches de blocs réduits (moellons*).
Au pied du mur, il s’agit alors de traiter chaque élément tel un grand couturier : tailler chaque moellon à sa juste dimension, le présenter à sa place, puis le rectifier. Au marteau et au burin, éliminer telle ou telle aspérité de sorte que la pierre du dessus repose sur son inférieure par trois points d’appui sûrs, faute de quoi elle rendrait l’ensemble de l’ouvrage fragile ou instable.
POSE DE LA PIERRE
Une fois bien ajustée, la pierre peut être installée à la place précise qui lui a été assignée.
Le remplissage des interstices entre les pierres se fera au moyen d’éclats de calage, afin d’éviter que celles-ci ne bougent dans aucune direction.
On posera également des pierres en boutisse*, c’est à dire avec leur plus petit côté en frontal et leur plus grand dans le sens de l’épaisseur. Dans les deux dernières assises, on posera des blocs plus lourds et plus allongés afin de renforcer le liaisonnement).
Un savoir-faire unique : L’élaboration de murs en pierres sèches est comme un puzzle en trois dimensions. Elle requiert un choix et un positionnement judicieux de la pierre, un ajustage minutieux et un emboîtement précis des éléments. Le maçon doit avoir un bon coup d’œil pour trouver une place à chaque pierre et une pierre pour chaque place.
Glossaire :
- Moellon* : pierre de petite dimension qui s’emploie dans les massifs de construction
- Pierre en boutisse* : pierre taillée qu’on place dans un mur suivant sa longueur, de manière à ne montrer qu’un de ses bouts.